FRONT ROUGE n°146 -06 mars 1975- hebdomadaire
organe central du
Parti Communiste Révolutionnaire (m.l.)
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Cambodge: victoires de la guerre du peuple

D'après Ford, si le Congrès ne vote pas crédits demandés pour le Cambodge "les forces cambodgiennes (fantoches de Lon Nol) seraient obligées dans quelques semaines de se rendre aux insurgés", Kissinger affirme de son côté que sans aide supplémentaire, la chute de Lon Nol est "certaine". Quel plus bel aveu de défaite d'une politique d'agression ininterrompue pendant cinq ans, face à un petit pays dont le peuple veut reconquérir son indépendance.

DEFAITES CUISANTES POUR LES YANKEES.

Phnom Penh étouffé, le Mékong coupé, l'aérodrome de Pochentong près de Phnom Penh cible d'attaques de plus en plus précises, la survie même du régime de Lon Nol est mise en cause par la grande offensive du peuple cambodgien commencée au premier janvier.
Le régime Lon Nol apparaît aux yeux de tous clairement pour ce qu'il est : rien, une marionnette dans les mains de Kissinger. C'est l'impérialisme US qui avait mis Lon Nol au pouvoir en 1970 pour étendre la guerre d'agression à toute l'Indochine dans l'espoir de vaincre le peuple vietnamien. C'est l'impérialisme US qui a été vaincu : il a déjà été obligé de reculer devant le peuple vietnamien, il doit plier une nouvelle fois devant le peuple cambodgien.
L'offensive actuelle est un coup décisif porté à la "khmérisation" de la guerre mise sur pied par les yankees. Des soldats cambodgiens équipés par les USA, encadrés par des "conseillers" US, étaient chargés d'imposer au peuple cambodgien la domination américaine.
Les bataillons ainsi constitués sont taillés en pièces un par un ! les soldats enrôlés de force rallient le camp des forces populaires ! La "khmérisation" de la guerre s'écroule face à la guerre du peuple cambodgien, dirigé par le GRUNK, pour reconquérir l'indépendance nationale.

UNE VICTOIRE DE TOUT LE PEUPLE CAMBODGIEN.

C'est le peuple cambodgien tout entier est dressé contre le régime Lon Nol, contre l'agression US. Pour soutenir les forces de libération tout le peuple dans la zone libérée est mobilisé. A l'arrière des troupes, la population des environs de Phnom Penh a multiplié par cinq ses capacités de transport pour approvisionner le front. Sur le Mékong les habitants venaient aider les soldats à décharger les péniches capturées. Sur tous les fronts les habitants aident les soldats à récupérer le matériel militaire, à relever les blessés pour les ramener à l'arrière. Par contre, les habitants des régions occupées par les fantoches refusent d'alimenter les troupes de Lon Nol. Les habitants de Phnom Penh, d'autres villes notamment Battambang, ripostent violemment aux tentatives de recrutement forcé des troupes fantoches, s'emparent des stocks de vivres cachés par les fantoches et les distribuent équitablement, manifestent de plus en plus violemment contre les conditions de vie que leur impose le régime Lon Nol. Soixante mille habitants de ces régions ont rejoint la zone libérée. Un commandant de la région de Battambang déclarait il y a quelques jours : "Le peuple ne nous soutient pas. Il vaut mieux cesser le combat". Des soldats désertent, des bataillons se mutinent, refusent de monter au front.

LES MANOEUVRES DE KISSINGER

La seule issue qu'entrevoit le belliciste Kissinger, prix Nobel de la paix est la poursuite de l'agression et son aggravation, II demande au Congrès US de voter un supplément d'aide de 220 millions de dollars. Le Congrès a refusé !
Il en a assez de voir des millions de dollars engloutis par des régimes incapables d'imposer la politique US et corrompus, d'autant que nombre de sénateurs hostiles à l'octroi d'une aide supplémentaire, comme Jackson, souhaitent que les Etats-Unis augmentent leur soutien à l'Etat sioniste et accroissent leur présence militaire au Moyen-Orient. Les décisions du Congrès n'empêchent pas Kissinger d'engager de plus en plus de forces au Cambodge. Des bombes qui absorbent l'oxygène sur 3 km2 et détruisent ainsi toute vie ont été récemment larguées sur le territoire libéré ; d'anciens pilotes yankees pilotent des avions du pont aérien, dans des avions fournis par l'armée US. Des appareils US ont été abattus sur tous les champs de bataille. Pour tourner l'interdiction prononcée par le Congrès d'utiliser des militaires US, l'armée de Taiwan a pris en main l'aviation de Lon Nol. Au cours du mois de Janvier, l'impérialisme US a envoyé des avions thaïlandais et saïgonnais pour bombarder le territoire libéré.

GRUNK A PHNOM PENH

Ni les milliards de dollars déversés en Indochine, ni les bombardements les plus barbares de l'histoire de l'humanité n'ont empêché les yankees de subir de cuisantes défaites au Vietnam et au Laos. Ils n'ont pas entamé la volonté du peuple cambodgien de recouvrir l'indépendance, ni empêché d'emporter d'importantes victoires. Au cours du 2ème Congrès du FUNK tenu les 24, 25 février dans la zone libérée, le GRUNK a réaffirmé sa volonté de détruire la clique de Lon Nol.
Toutes les manœuvres de l'impérialisme US pour ouvrir les négociations en vue de créer un prétendu gouvernement de coalition ont échoué. Elles ne visaient qu'à maintenir le fantoche Lon Nol et ses acolytes au Cambodge, pour y mener la politique US. Lon Nol ne représente aucune fraction de la population, il ne représente que l'impérialisme US. Le peuple cambodgien tout entier est représenté par le GRUNK, seul. La victoire du peuple cambodgien contre l'impérialisme US c'est le GRUNK à Phnom Penh.
Le peuple cambodgien et ses dirigeants sauront repousser les manœuvres US ainsi que toutes les manœuvres d'autres puissances impérialistes pour tenter de profiter de leur victoire. Les 5 dernières années de la lutte armée les ont, entre autre, mis en garde contre l'autre super -puissance, le social-impérialisme soviétique qui pendant 3 ans s'est obstiné à reconnaître Lon Nol comme représentant du peuple cambodgien, accréditant un ambassadeur à Phnom Penh, refusant de soutenir le GRUNK, ne révisant ses positions que quand la victoire des forces populaires leur est apparue inéluctable !
Pour tous les peuples d'Indochine l'offensive en cours est leur lutte. La RDV a protesté contre le pont aérien à partir de Saïgon, le GRP, au cours d'une visite dans la zone libérée, a affirmé son entière solidarité avec le peuple cambodgien : la victoire du peuple cambodgien sera un nouveau pas vers leur victoire commune, l'éviction totale de l'impérialisme US hors d'Indochine.

Grégoire CARRAT


manifestation des lycéens contre le régime pourri de Lon Nol


 

au cours d'un communiqué commun :
LE GRP ET LE GRUNK SALUENT L'UNITE DES
PAYS DU TIERS-MONDE CONTRE L'IMPERIALISME

En décembre 1974, une délégation du Gouvernement Révolutionnaire Provisoire (GRP) et du Front National de Libération (FNL) du Sud Vietnam a rendu visite dans les territoires libérés du Cambodge au Gouvernement Royal d'Union Nationale du Cambodge. Ainsi a été souligné, au cœur même d'un pays que l'impérialisme a tenté vainement de s'assujettir, la solidarité des peuples d'Indochine qui ont, grâce à la guerre populaire, infligé de cinglantes défaites à l'impérialisme. Ainsi, comme le montre le passage du communiqué commun des délégations des deux pays que nous publions, a été souligné aussi, comment les victoires remportées par ces peuples contribuent à l'unité du Tiers Monde qui grâce à cette unité porte aujourd'hui des coups décisifs à l'impérialisme.
" Les deux parties déclarent à nouveau leur ferme soutien, comme auparavant, ainsi que dans l'avenir et en toutes circonstances, aux peuples arabes qui sont en train de lutter sous toutes les formes, en faisant usage de tous leurs moyens pour faire face aux sionistes israéliens agresseurs, en vue de libérer le territoire de la Palestine et le territoire des pays arabes occupés brutalement par Israël.
Les deux parties soutiennent entièrement la déclaration commune de la Conférence au Sommet des pays arabes tenue dans la ville de Rabat, selon laquelle ils ont décidé de reconnaître officiellement l'Organisation de Libération de la Palestine comme l'unique représentant légitime et légal du peuple de Palestine. Les deux parties se réjouissent vivement des nouvelles victoires du peuple de Palestine sur l'arène internationale. (...)
Les deux parties se félicitent de ce que la force d'union des pays non alignés se développe sans arrêt et elles déclarent se solidariser de façon ferme et inébranlable avec tous les pays non alignés d'Asie, d'Afrique et d'Amérique Latine qui se dressent contre l'impérialisme et le néo-colonialisme pour l'indépendance, la liberté, la souveraineté nationale complète sur les plans économique et politique, la souveraineté sur leurs propres ressources naturelles. Les deux parties apprécient très hautement le succès historique de la Conférence au Sommet des pays non-alignés tenue en septembre 1973 à Alger et se réjouissent vivement de la nouvelle victoire de ce mouvement. En tant que membre à part entière de la grande famille des pays non-alignés, les deux parties déploieront tous leurs efforts pour apporter leur part de contribution active au mouvement de lutte légitime et juste des peuples des divers pays dans cette grande famille
".


Le point sur la situation militaire

En tous les points du territoire cambodgien que les fantoches de Phnom Penh contrôlent encore, les forces armées de libération (FAPLNK) ont lancé depuis le début du mois de janvier une grande offensive. Après avoir libéré 95% du territoire cambodgien depuis l'intervention US en mars 1970, le peuple cambodgien dirigé par son Gouvernement royal d'union nationale du Cambodge (GRUNK) poursuit la libération des territoires que la clique de Lon Nol semblait tenir le plus solidement, aujourd'hui réduite à de simples enclaves encerclées par les zones libérées. C'est le cas notamment de la province de Battambang, adossée à la Thaïlande, où les yankees avaient envisagé de transférer Lon Nol en cas de menace grave sur Phnom Penh : les positions fantoches tombent les unes après les autres ; la capitale de district Maung au sud de la province a été libérée, isolant la province de Phnom Penh tandis que la route de Phnom Penh à Battambang est sur tout son parcours libérée.

Après avoir brisé les ceintures de défense autour de Phnom Penh au cours de la saison sèche de 1974 et contraint les forces fantoches rescapées à reculer dans la ville, les forces armées populaires (FAPLNK) poursuivent la destruction systématique des postes militaires tout autour de la ville.
Après avoir, en 1974, pris le contrôle de toutes les routes qui menaient à Phnom Penh, détruisant tous les postes militaires fantoches chargés de permettre l'acheminement du matériel U.S. destiné aux fantoches, les FAPLNK ont pris au cours du mois de janvier le contrôle des rives du Mékong depuis la frontière avec le Vietnam, jusqu'à Phnom Penh, ainsi que le contrôle du Tonle Sap au nord de la ville.

Aucun bateau n'est parvenu à Phnom Penh depuis le début du mois de janvier. Tous les convois envoyés, depuis Saïgon par les Américains ont été obligés de rebrousser chemin dès qu'ils atteignaient la frontière du Cambodge, ou ont été détruits, leur cargaison étant récupérée par les FAPLNK aidées de la population des rives.
C'est la destruction massive du matériel et des troupes du régime Lon Nol, matériel fourni par l'impérialisme U.S., troupes encadrées par les "conseillers" U.S. (135 navires ont été détruits en janvier sur le Mékong, 40 dans les premiers jours de février) ; depuis, le Mékong n'est plus utilisé. Près de 20.000 soldats fantoches ont été mis hors de combat, un général tué ainsi que le gouverneur de Udong. Des milliers d'armes de tous calibres, plus de 10 tonnes de munitions ont été saisis.
Ce qui est en cause aujourd'hui, c'est la possibilité pour le régime fantoche de continuer malgré l'appui américain à exister sur une parcelle du territoire cambodgien.
La route du Mékong coupée, il ne reste pour ravitailler les fantoches en armes et en munitions que l'aéroport de Pochentong. Le pont aérien, mis en place par les yankees, au prix de cinq millions et demi de dollars en deux mois ne permet d'acheminer que 18.000 tonnes de matériel, contre 120.000 tonnes qui étaient acheminées par le Mékong.
L'aéroport est la cible d'attaques de plus en plus nombreuses des FAPLNK. "C'est l'enfer", déclarait un pilote américain blessé sur l'aéroport ; les cargos laissent tourner leurs moteurs pendant le déchargement pour pouvoir décoller plus vite.
L'aide américaine ne pouvant parvenir à Phnom Penh, ni dans les autres villes encore "contrôlées" par Lon Nol, le régime Lon Nol n'est plus rien.


A PHNOM-PENH :
La classe ouvrière
à la pointe du combat

La lutte dans les villes occupées par Lon Nol est très vigoureuse. A Phnom Penh les ouvriers sont à la pointe du combat Les ouvriers de l'usine de textile Chip Tong ont engagé une lutte résolue contre leurs conditions de vie.
La lutte a été préparée plusieurs jours à l'avance par des réunions. Le 17 décembre la grève a éclaté, chacun avait sa tâche, apposer des banderoles, participer à un groupe d'auto-défense contre une éventuelle intrusion de la police militaire, se poster en sentinelle.
Les mots d'ordre des banderoles visaient directement le régime Lon Nol:
"défaite au plan de fermeture des usines pour recruter les ouvriers", "libération immédiate et inconditionnelle de tous les ouvriers détenus illégalement par l'administration félonne", "paiement immédiat de leurs salaires aux ouvriers", "du riz à vendre et à distribuer en quantités suffisantes aux masses laborieuses", "pour les ouvriers lutter c'est vivre, ne pas lutter c'est mourir", "Nous luttons pour la victoire finale".
Pour régler les salaires impayés, les ouvriers ont mis en vente du tissu fabriqué par l'usine, à un prix à la portée des bourses des habitants pauvres. De nombreux "clients" apportent aux grévistes du riz cuit.
Des centaines de policiers venus pour déloger les ouvriers de l'usine sont empêchés d'intervenir par les habitants solidaires des grévistes qui les huent et leur barrent la route, ceux qui parviennent à l'usine sont repoussés par les ouvriers qui contre attaquent à l'aide d'armes improvisées.
De telles luttes affectent de nombreuses usines de Phnom Penh, Kampot, Battambang. La terre brûle sous les pieds de Lon Nol et de ses maîtres yankees jusque dans ses repaires.

 

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