Le Quotidien du Peuple (organe central du PCRml) n°831 -du 13 /14 / 15 janvier 1979- page 5

CONTRAIRES AU SEIN DU PEUPLE
FAUT-IL OU NON PARTICIPER AU JOURNEE D'ACTION ?

Ni 24 heures sans lendemain, ni isolement à la base !

Grève de 24 heures ou pas, cette question qui se pose avec acuité chez les travailleurs et les syndicalistes depuis maintenant quelques années suscite encore un débat, notamment depuis l'échec de la gauche en mars 78 ; et ce n'est pas un hasard.
Grève tremplin ou grève plongeoir ?
Temps fort, ou grève soupape ?
Grève protestation ou action réelle ?
Grève revendicative ou grève politique ?
. La vérité n'est pas facile à saisir, essayons d'abord de voir.

Les caractéristiques de la grève de 24 H

Les travailleurs ont besoin face à la coordination patronale, de lutter ensemble.
Parce que le rapport de force sur chaque entreprise n'est pas évident à réaliser dans tous les cas ; parce qu'il faut lutter contre les divisions des branches, du chômage, du public et du privé etc...
La grève de 24 heures est interprofessionnelles, s'adresse à tous, elle peut de ce point de vue répondre à un besoin.
Une autre caractéristique de la journée de 24 heures, c'est qu'on ne s'adresse plus seulement à son propre patron, comme dans une grève de boîte, mais directement au patronat et au gouvernement. De ce fait les revendications sont plus globales et la possibilité de <<politisation>> plus grande.
Un troisième aspect, non négligeable comme on le verra, est qu'elle ne peut être décidée qu'au sommet syndical, que selon les cas elles seront unitaires ou non. Le poids des structures de base est très faible dans la décision : aux états majors de décider si ce sera un 7, un 24, un 15 qui s'ajoutera à la longue liste de la petite histoire syndicale.
Ce sont quelques caractéristiques de ces journées, et qui permettent d'être utiliser d'une certaine façon :
Avant les élection de mars 78, moment capital pour eux, le PC et le PS ont enfourché dans les syndicats le cheval des 24 heures. Tous deux d'accord pour en faire des journées qui manifestent la volonté de <<changement politique>> puisque l'interlocuteur est le gouvernement qu'ils prétendaient remplacer.
Mais, en même temps, des journées qui ne puissent pas déboucher sur un mouvement de lutte généralisé contre le plan Barre, car cela aurait compromis les élections (ces politiciens gardant en mémoire le souvenir cuisant des élections qui avait suivi le mouvement de mai 68). De ce point de vue, et PC et PS ont pesé dans les syndicats pour faire de ces journées des grèves soupapes et sans lendemain où pouvait s'exprimer la combativité ouvrière et la canaliser vers les objectifs électoraux. Ils cherchaient à imposer à ces journées chacun de leur côté l'objectif revendicatif de leurs programmes; on se souvient à cet égard de la question des nationalisations, par exemple. Action ponctuelle sur un objectif global, la grève de 24 heures ne pouvait avoir qu'un but : démontrer aux travailleurs que ce qu'ils ne pouvaient obtenir par la lutte, ils devaient tenter de <<l'arracher par le bulletin de vote>> !
Devant des mots d'ordre de 24 heures de ce type, travailleurs et syndicalistes étaient souvent pris dans la contradiction : ou ne rien faire, ou se battre avec les autres, mais pour des prunes.
Aujourd'hui les élections ne sont pas à l'ordre du jour et les syndicats cherchent à refaire le terrain que leur tactique a fait perdre. On voit alors ceux qui les ont longtemps qualifiés de gauchiste ou basiste reprendre les arguments contre les journées d'action de 24 heures, mais pour repousser cette fois tout mouvement d'ensemble.
En réalité, l'opposition n'est pas entre 24 heures ou pas. S'il faut rompre à tout prix avec le type de grèves que nous avons subies ces dernières années, cela ne saurait être pour se retrouver chacun isolé à la base, en butte aux mêmes problèmes; cela ne saurait ne saurait être aussi pour renforcer la division syndicale entre les tenants et les détracteurs des 24 heures comme le 21 décembre sur la Sécurité sociale. Ni 24 heures sans lendemain, ni lutte à la base sans coordination.
Il faut se battre pour des actions d'ensemble dont les objectifs permettent de lutter contre les divisions entraînées par la crise et le chômage, dont les objectifs soient précis, et que les travailleurs sachent comment ils avancent. Il faut que ce type d'action se poursuive, pas forcément de 24 heures en 24 heures, mais jusqu'à ce que satisfaction soit obtenue. C'est un processus d'action qu'il faut mettre en place de façon unitaire, et pour obtenir des résultats.

D.N.
Syndicaliste du Rhône

 

 

Le Quotidien du Peuple (organe central du PCRml) n°831 -du 13 /14 / 15 janvier 1979- page 5

CONTRAIRES AU SEIN DU PEUPLE
FAUT-IL OU NON PARTICIPER AU JOURNEE D'ACTION ?

Unité d'action, une priorité aujourd'hui

Faut-il ou non participer aux journées d'action de 24 heures ?
Depuis le temps que les directions syndicales nous promènent de la Nation à République en passant par Bastille, pour rien, pour reprendre le lendemain après avoir laissé au patron une journée de salaire, la réponse semblait claire. Du moins pour de nombreux militants de la CFDT.
Combien de fois avons-nous dénoncé ces journées d'action de 24 heures qui démobilisent les travailleurs et usent les mot d'ordre de grève, qui désamorcent les mouvements de lutte au lieu de les impulser ! Combien de fois avons-nous dénoncé ces journées sans lendemain qui, dans la période pré-électorale, n'ont servi qu'à faire pression pour le programme commun que notre confédération n'avait pas signé - même si, par ailleurs, elle ne se gênait pas au niveau de sa direction pour indiquer que c'était la seule solution. Nous avons été nombreux à dire et répéter que Maire et Séguy se servaient de nous lors de ces journées pour mettre le poids des syndicats au service des partis de gauche.
Oui, mais aujourd'hui, la situation n'est plus la même. Sans doute, si la direction CGT lance ses troupes dans la bataille aujourd'hui, sans trop savoir, où elle va, c'est principalement une fuite en avant, c'est un moyen d'esquiver les questions de fond qui se posent dans ses rangs sur la stratégie syndicale suivie avant mars 78. Sans doute, aussi, cherche-t-elle à rallier un certain nombre d'éléments combatifs qui ne lui font pas toujours confiance.
Mais la question n'est pas là ! La CGT veut l'action ! Nous aussi. Les travailleurs, dans leur immense majorité, veulent l'unité d'action entre les 2 grandes centrales ! Nous aussi. Les préoccupations de boutiques ne pèsent pas lourd face à ces exigences. Nous les avons vues à l'oeuvre dans le congrès URP qui s'est tenu, début décembre, mais nous avons vu également la très grande volonté d'unité d'action qui venait de très nombreux syndicats.
Aussi, cette unité d'action doit se faire aujourd'hui, y compris à l'occasion de ces journées de 24 heures. C'est pourquoi nous étions un certain nombre de syndicalistes CFDT à débrayer et à défiler aux côtés de nos camarades de la CGT.
Cela pour au moins deux raisons :
- La première, c'est qu'il faut faire avancer l'action. A tout prix. Et que, dans la période, toutes les occasions sont bonnes à prendre. Pouvait-on laisser passer les atteintes très graves contre le sécurité sociale, pouvions-nous laisser attaquer nos acquis sans riposter immédiatement ? La CGT a été la seule à proposer une riposte globale de tous les travailleurs, secteur privé et fonction publique réunis. Nous y avons participé. Nous savons bien qu'une grève de 24 heures ne suffit pas, mais tout ce qui va dans le sens d'une conrtre-attaque contre les coups de Giscard-Barre, est bon à prendre aujourd'hui. C'est le seul moyen de faire redémarrer l'action. A condition, bien sûr, que l'unité se fasse dans les entreprises et dans les sections. Dans notre secteur, si nous avons appelé à la grève le 21 décembre (CGT et CFDT), c'est parce que cette grève a été décidée en AG et de façon majoritaire.
- La deuxième raison qui nous a déterminés à réagir, est une raison interne à notre confédération. Au nom d'un réalisme syndical aux accents rocardiens, Maire et la direction confédérale bloquent toute action globalisante et veulent nous enfermer dans une négociation branche par branche, atelier par atelier...
Le refus d'unité d'action avec la CGT, nettement affirmé par Maire à la télévision, alors que les négociations entamées sur le plan de la région parisienne n'étaient pas terminées, confirme bien cette volonté de transformer la stratégie syndicale telle qu'elle était sortie du dernier congrès et de l'infléchir encore plus dans le sens d'un blocage de l'action au bénéfice d'une négociation tous azimuts. La vigueur avec laquelle la confédération a mis en garde les militants CFDT qui, en participant a la journée du 21, se livreraient à une action dirigée contre la CFDT, montre qu'elle est décidée à imposer cette ligne, coûte que coûte, jusqu'au congrès de Brest qui se prépare.
Relancer l'action, s'opposer à l'intérieur de la CFDT à ceux qui veulent remettre en cause tous les acquis depuis Lip, voilà deux bonnes raisons au moins qui nous déterminent à nous saisir de ces journées de 24 heures en leur imprimant notre marque, même si elles n'apportent pas de solutions immédiates.

M.D et F.J
Syndicalistes CFDT
de la région parisienne

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