LETTRE OUVERTE AUX COMMUNISTES
RETROSPECTIVES ET PERSPECTIVES

(Contribution)

Texte de Raymond CASAS -juin 2002-

 

Curieusement mais fatalement, l'effondrement de la société socialiste mondiale en marche théoriquement vers le communisme, pour laquelle les hommes n'étaient pas prêts spirituellement, a amené très rapidement au regard de l'histoire, en quelques décennies, une accélération fantastique des contradictions de la seule société régnante désormais, celle du capitalisme au stade de l'impérialisme " mondialiste ".

Crises économiques bien sûr, mais crise générale, morale, spirituelle, écologique engendrant famines, misère, chômage, flux migratoires sauvages, prostitution, sida, esclavagisme, trafics en tous genres, drogues, armes, vols, détournements de l'aide humanitaire, blocus et diabolisation des pays pauvres révoltés, écrasement par le capital armé des dernières fédérations socialistes honnêtes pour les livrer à la mafia, guerre au nom du seul droit des pays riches, terrorisme généralisé.

Nous assistons au triomphe de la mafia mondialiste sur le commerce petit et grand bourgeois traditionnel, à la corruption généralisée des institutions financières, bancaires, boursières, médiatiques, et politiques, dont les élus de toutes tendances ne sont plus que les larbins plus ou moins conscients du capital.

Marx - Engels, Jaurés et Lénine auraient analysé notre époque comme celle de la crise générale du capitalisme, et sans doute de la phase finale d'un système mondiale périmé, ayant sécrété, engendré, élaboré, produit, réalisé et enfanté involontairement son autodestruction, selon le principe bien connu : " tout phénomène porte en lui le germe de sa destruction future, et toute destruction porte en elle le germe de la reconstruction ".

Staline, l'avant dernier " diable rouge " incontournable avant Mao, le dernier visionnaire rouge du communisme à venir, Staline donc écrivait en 1947 : " Les problème économiques sont indépendants de la volonté des hommes ". Staline réfléchissait sur les problèmes économiques du Socialisme en URSS, mais sa réflexion reste valable pour tous les systèmes. Staline mettait l'accent sur la conscience générale d'une société, d'un peuple face au travail, à la recherche, à la production, aux besoins. Il responsabilisait les hommes, l'homme communiste, qu'il taxait de " capital le plus précieux "; dès 1937, il envisageait la valeur du travail et de l'échange socialiste des biens de produits, il insistait sur la haute conscience de l'homme face à la construction de la société nouvelle. Avec une lucidité qui paraîtrait stupéfiante aux hommes de ce siècle, s'ils pouvaient en prendre connaissance, il déclarait sous forme de testament historique : " Si les cadres communistes ignorent ou méprisent la légende mythologique d'Antée, fils de Poseïdon, invincible à la condition de rester les pieds sur terre, s'ils se laissent recouvrir de la rouille bureaucratique, se coupent du peuple, alors ils deviendront des nullités et tout ce que nous avons commencé de construire sera anéanti. " (on comprend que ses héritiers parjures aient détruit jusqu'au dernier de ses livres et que la censure médiato-mondialiste " diabolise " " l'ogre ".)

De Gaulle avec sa thèse sans lendemain du " Capital-Travail " rêvait d'un principe identique, idéal, sans pour autant vouloir détruire le capitalisme, comme le crurent les stupides politiques des USA qui se méfiaient de l'homme du 18 juin comme d'un " cryptocommuniste ".

Seule une élévation spirituelle de la conscience humaine rassemblant certes les " Prolétaires de tous les pays " selon le souhait du manifeste de 1848, mais, aussi tous les hommes et les femmes " de bonne volonté " unis par le dénominateur commun de la justice social et du pain à partager. Seule cette communion morale des citoyens de toutes familles spirituelles peut imposer un renversement de l'orientation destructrice actuelle de notre société, mais seul un noyau lucide et révolutionnaire peut rassembler cette avant garde.

L'échec de la première société socialiste construite par l'URSS en marche théoriquement vers le Communisme, étendue à ¼ du globe est un exemple riche d'enseignement pour l'avenir de notre planète humaine. Encore faut-il vouloir analyser cette expérience de ¾ de siècle les yeux ouverts et en toute objectivité, sans en rester à la thèse de diabolisation, de la criminalisation lancée par Goebbels et reprise par tous les ennemis et adversaire du Socialisme depuis 60 ans.

L'erreur fondamentale des communistes soviétiques et d'autres pays par voie de conséquence, fut de croire qu'il suffisait de travailler d'arrache pied en " stakhanoviste " pour moderniser la société en développant à outrance sciences et techniques (ce qui fut fait), en poussant la production au delà des limites de la sécurité (Tchernobyl) et d'imposer comme " credo " une théorie matérialiste absolue, sectaire, une véritable religion dogmatique nouvelle sans base spirituelle profonde face au christianisme dont le peuple slave était imprégné.

Cependant Marx avait précisé et prévenu : " Mon étude, ma théorie n'est pas un dogme mais un guide pour l'action. "
Ce que Lénine a révélé juste.
La moralité de cette épopée historique nous amène à ce constat immuable : les hommes peuvent s'unir sur un dénominateur commun contre un péril commun et le vaincre, l'éradiquer, ils peuvent même le faire spontanément comme récemment le 21 avril 2002 en France ; mais il est beaucoup plus difficile aux hommes, même de classe et d'idées identiques, de s'unir pour un projet commun concernant le don de soi même à la société.

Or le matérialisme historique, très riche d'autre part, en ce qui concerne les aspects concrets de la société capitaliste d'exploitation de l'homme par l'homme, très riche sur l'orientation et la cohésion des moyens humains et révolutionnaires pour éradiquer cette société, la vaincre, l'anéantir, ne dégage pas une philosophie, une théorie, une attitude morale et spirituelle suffisante pour élever la conscience humaine au niveau des nouvelles nécessités et obligation matérielles, au niveau des nouvelles conquêtes scientifiques et techniques. En clair nous savons que la science sans conscience c'est l'échec.

Or nous constatons que la nouvelle société socialiste née de la révolution eut tendance à croire que l'élévation matérielle et scientifique suffisait à donner au peuple une conscience nouvelle en améliorant les conditions matérielles. Rien n'est plus faux.

Nous pouvons faire un constat similaire dans notre société libérale. Un penseur célèbre, Daniel ROPS, après avoir lu " Le Capital " s'est écrié un jour : " Quel dommage que Marx n'aie pas été un Chrétien, " Le capital " eut été notre bible ! ".

Cette réflexion contient toutes les raisons, toutes les conséquences également de l'échec de la société communiste érigée par Lénine et Staline.

Rops avait été frappé par la justesse, le réalisme de l'analyse de Marx en ce qui concerne les tares de la société capitaliste et les moyens à mettre en œuvre pour la supprimer.

Mais il avait été autant frappé par le vide, l'absence de références et de bases spirituelles dans l'ouvrage de Marx. De plus, l'anticléricalisme aidant, balayant outre le Vatican support inconditionnel du capitalisme, tout l'acquis positif du christianisme de base très ancré chez les Orthodoxes, sans apport d'une nouvelle force spirituelle équivalente ou rénovée adaptée aux valeurs positives existantes, ce vide spirituel ne pouvait être durable selon Rops.

Rops avait mesuré ce déséquilibre, cette contradiction qui ne pouvait manquer d'éclater ou " d'imploser " (car c'est une implosion lente que nous avons assisté).

Nous conclurons que la société marxiste léniniste d'URSS, société précommuniste nouvelle, portait en elle comme tout phénomène le germe de sa propre destruction. Seul, à mon avis, Staline avait bénéficié d'une éducation et formation religieuse très poussée l'a ressenti et prévu dans son évocation de la légende d'Antée.

Cette brève rétrospective doit nous éclairer sur les perspectives à court et long terme de notre société malade du capitalisme.

Il est évident que le processus d'implosion de la société capitaliste, impérialiste et mondialiste dont les USA sont la vitrine la mieux achalandée, ce processus est engagé symboliquement pratiquement depuis le 11 septembre 2001.

Il est remarquable que la fameuse " Guerre Froide " menée par le capitalisme au lendemain de la seconde guerre mondiale n'a jamais dégénéré en guerre " Chaude " entre les 2 blocs, sinon les interventions américaines en Corée et Viet Nam, c'est à dire des actions impérialistes unilatérales contre des pays du Tiers Monde luttant pour l'indépendance et le Socialisme.

Or depuis le 11 septembre, la situation sans le camp communiste s'est retournée. Le serpent impérialiste se mord la queue et les chiens de guerre se retournent contre le maître. Ce sont précisément les forces terroristes du capital, particulièrement les intégristes islamistes déjà utilisés contre l'URSS puis la Russie et la République Fédérale Yougoslave, qui frappent le capitalisme à la tête, au sommet, sur le territoire " sacré " de Wall Street mais aussi dans les pays occupés par les centurions du dernier empire, et ils sont nombreux, pas moins de 30 de Cuba aux Philippines.

Outre les mouvements terroristes qui vont d'Al Qaeda aux brigades rouges en passant par une multitude de groupes ultranationalistes et fondamentalistes, il existe ce que Bush le mal élu nomme les " états voyous " dont certains rêvent d'utiliser leurs sous-marins de poche vendus par la mafia russe, équipés de missiles. Le récent attentat de Karachi n'est qu'un aspect de la guerre sous marine dans laquelle la France est engagée par une poignée d'irresponsables politiques.

Dans cet immense ballet terroriste au centre duquel se débattent les USA et leurs mercenaires, que devient le mouvement révolutionnaire international qui, selon les prophéties de Marx et Lénine, doit prendre la relève du capital moribond ?

Il n'existe plus en tant que force organisée du type de la IIIème Internationale, même si d'immenses forces potentielles, divisées, dispersées, atomisées, se réclament toujours du Communisme en France particulièrement, mais ayant perdu l'essentiel de leurs repères après 40 ans de dérive révisionniste depuis le fameux XXème Congrès du PCUS de 1956. Cependant aucune révolution ne peut triompher sans un noyau solide, homogène, éprouvé sans un parti réellement marxiste-léniniste. La non existence d'un tel parti n'empêche cependant en rien la situation sociale de devenir révolutionnaire. La révolution est une manifestation populaire extrême, elle tend toujours à détruire le système existant sans pouvoir autant le remplacer par un nouveau système conforme aux aspirations du peuple. Si cette révolution est incapable de donner des dirigeants nouveaux dignes de ce nom suffisamment préparés et organisés pour assumer un changement attendu par la société, alors elle aboutira à une dictature digne d'une république bananière, l'ordre étant toujours rétabli par le groupe qui possède les moyens, c'est-à-dire les armes et l'argent. Le rôle d'un véritable parti révolutionnaire n'est pas de déclencher la révolution ; ceux qui songent à cela sont des utopistes dangereux.

Jaurés nous a dit : " Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l'orage " ; il aurait pu ajouter la guerre et son corollaire, la Révolution.

Jamais Lénine n'aurait pu faire triompher la Révolution en Octobre 1917 si deux facteurs essentiels n'avaient été réunis :

1°) Si le capitalisme n'avait provoqué ce terrible charnier de 14/18 où les peuples d'Europe touchèrent le fond de l'horreur et de la misère, de la révolte.

2°) Si son parti n'avait été préparé à une telle éventualité, à convaincre, entraîner, organiser les couches révolutionnaires des intellectuels au prolétariat.

Le danger principal d'un échec révolutionnaire mondial en ce début du 21ème siècle est la possibilité pour l'impérialisme au stade suprême d'opposer dans un conflit éthique et religieux l'Occident chrétien et l'Orient Musulman. La colonisation militaire sanglante de la Palestine par une armée dite d'Israël, suréquipée par les USA au mépris de 100 résolutions de l'ONU, crime de guerre sans précédent depuis Hitler est à la fois le banc d'essai et le détonateur de ce probable conflit mondial qui doit embraser 3 continents.

Les nombreux actes " terroristes " des patriotes " kamikazes " désarmés et désespérés contre l'impérialisme colonialiste triomphant nous fait mesurer cruellement la carence du mouvement révolutionnaire actuel, impuissant à coordonner la colère des peuples contre cette guerre programmée.

Nous savons que le capitalisme, l'impérialisme, ne peut résoudre ses problèmes, ses contradictions que par la guerre ; mais, nous savons aussi qu'une fois engagée, une guerre peut changer de caractère et d'objectif. Une guerre inter-capitaliste impérialiste peut devenir par la volonté populaire une guerre révolutionnaire. C'est l'histoire de 14/18 où les USA intervinrent en 1917 et imposèrent au capitalisme allemand l'arrêt des hostilités (armistice) pour mieux conjurer le danger principal : la révolution bolchevique contagieuse. Ce processus se répète en 1944 en prévision d'une libération totale de l'Europe par les armées de Staline (encore une fois : De Gaulle même fait peur aux impérialistes).

Nous devons réfléchir à cet acquis révolutionnaire " expérimental " qui doit retenir toute notre attention : durant près d'un siècle, seul l'idéal communiste a réussi à unir sous le drapeau du socialisme des hommes de toutes nations, origines, aux formations, races et cultures, religions et ethnies différentes voire opposées. Seul un parti de type nouveau, fort de l'expérience vécue, pourra rééditer ce phénomène unique de la IIIème internationale qui fût une première historique mondiale.

La reconstruction d'un tel parti, d'une telle internationale, est un impératif incontournable pour tous les peuples.

Pour réussir, une révolution ne doit pas obligatoirement compter uniquement sur la force, la violence et la terreur sans limites, mais sur l'organisation préalable et continue d'un parti fiable, organisé, très éduqué, décidé et prudent à la fois déterminé et réfléchi, confiant et ouvert à ses alliés, de toutes familles spirituelles, aux hommes de bonne volonté dévoués au peuple.

Je terminerai cette lettre par un extrait d'une autre lettre, celle de Pierre THOREZ, fils de Maurice Thorez, tirant les enseignements de l'écrasement électoral du PCF de Robert Hue en juin 2002. " Ce n'est pas le communisme qui a été sanctionné, mais l'abandon de ses principes essentiels ".
Maurice s'était écrié : " Il faut que les bouches s'ouvrent ! ". Voilà qui est fait : Au travail pour reconstruire un parti de type nouveau adapté aux conditions de notre époque. A nous d'en revenir aux " principes essentiels ", forts de l'expérience acquise.

Prolétaires de tous les pays et hommes de bonne volonté : Unissez-vous !

R.CASAS -01-07-2002

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