Les commémorations du Débarquement
et la propagande bourgeoise:

--- 6 Juin 44 :commémoration ou mystification ? , par Nico Hirtt - 05/06/2004 -

--- 6 juin 44 : ce qu'on ne vous dira pas demain -par Michel Collon -le 5 juin 2004-

--- A propos des cérémonies du 60e anniversaire du débarquement. par Fabien LB -18-06-2004

--- Bush redébarque en Normandie: Liquidez quelques mythes de la Seconde Guerre mondiale par Lieven Soete -16-06-2004

6 Juin 44 :commémoration ou mystification ? - par Nico Hirtt 05/06/2004

Par leur accumulation et par leur caractère unilatéral, les commémorations du soixantième anniversaire du Débarquement sont en train d'installer, dans la conscience collective des jeunes générations, une vision mythique, mais largement inexacte, concernant le rôle des Etats-Unis dans la victoire sur l'Allemagne nazie. L'image véhiculée par les innombrables reportages, interviews d'anciens combattants américains, films et documentaires sur le 6 juin, est celle d'un tournant décisif de la guerre. Or, tous les historiens vous le diront : le Reich n'a pas été vaincu sur les plages de Normandie mais bien dans les plaines de Russie.

Rappelons les faits et, surtout, les chiffres.

Quand les Américains et les Britanniques débarquent sur le continent, ils se trouvent face à 56 divisions allemandes, disséminées en France, en Belgique et aux Pays Bas. Au même moment, les soviétiques affrontent 193 divisions, sur un front qui s'étend de la Baltique aux Balkans. La veille du 6 juin, un tiers des soldats survivants de la Wehrmacht ont déjà enduré une blessure au combat. 11% ont été blessés deux fois ou plus. Ces éclopés constituent, aux côtés des contingents de gamins et de soldats très âgés, l'essentiel des troupes cantonnées dans les bunkers du mur de l'Atlantique. Les troupes fraîches, équipées des meilleurs blindés, de l'artillerie lourde et des restes de la Luftwaffe, se battent en Ukraine et en Biélorussie. Au plus fort de l'offensive en France et au Benelux, les Américains aligneront 94 divisions, les Britanniques 31, les Français 14. Pendant ce temps, ce sont 491 divisions soviétiques qui sont engagées à l'Est.

Mais surtout, au moment du débarquement allié en Normandie, l'Allemagne est déjà virtuellement vaincue. Sur 3,25 millions de soldats allemands tués ou disparus durant la guerre, 2 millions sont tombés entre juin 1941 (invasion de l'URSS) et le débarquement de juin 1944. Moins de 100.000 étaient tombés avant juin 41. Et sur les 1,2 millions de pertes allemandes après le 6 juin 44, les deux tiers se font encore sur le front de l'Est. La seule bataille de Stalingrad a éliminé (destruction ou capture) deux fois plus de divisions allemandes que l'ensemble des opérations menées à l'Ouest entre le débarquement et la capitulation. Au total, 85% des pertes militaires allemandes de la deuxième guerre mondiale sont dues à l'Armée Rouge (il en va différemment des pertes civiles allemandes : celles-ci sont, d'abord, le fait des exterminations opérées par les nazis eux-mêmes et, ensuite, le résultat des bombardements massifs de cibles civiles par la RAF et l'USAF).

Le prix payé par les différentes nations est à l'avenant. Dans cette guerre, les Etats Unis ont perdu 400.000 soldats, marins et aviateurs et quelques 6.000 civils (essentiellement des hommes de la marine marchande). Les Soviétiques quant à eux ont subi, selon les sources, 9 à 12 millions de pertes militaires et entre 17 et 20 millions de pertes civiles. On a calculé que 80% des hommes russes nés en 1923 n'ont pas survécu à la Deuxième Guerre Mondiale. De même, les pertes chinoises dans la lutte contre le Japon -- qui se chiffrent en millions -- sont infiniment plus élevées -- et infiniment moins connues -- que les pertes américaines.

Ces macabres statistiques n'enlèvent bien évidemment rien au mérite individuel de chacun des soldats américains qui se sont battus sur les plages de Omaha Beach, sur les ponts de Hollande ou dans les forêts des Ardennes. Chaque GI de la Deuxième guerre mondiale mérite autant notre estime et notre admiration que chaque soldat russe, britannique, français, belge, yougoslave ou chinois. Par contre, s'agissant non plus des individus mais des nations, la contribution des Etats Unis à la victoire sur le nazisme est largement inférieure à celle que voudrait faire croire la mythologie du Jour J. Ce mythe, inculqué aux générations précédentes par la formidable machine de propagande que constituait l'industrie cinématographique américaine, se trouve revitalisée aujourd'hui, avec la complicité des gouvernements et des médias européens. Au moment ou l'US-Army s'embourbe dans le Vietnam irakien, on aura du mal à nous faire croire que ce serait le fait du hasard...

Alors, bien que désormais les cours d'histoire de nos élèves se réduisent à l'acquisition de « compétences transversales », il serait peut-être bon, pour une fois, de leur faire « bêtement » mémoriser ces quelques savoirs élémentaires concernant la deuxième guerre mondiale :

C'est devant Moscou, durant l'hiver 41-42, que l'armée hitlérienne a été arrêtée pour la première fois.

C'est à Stalingrad, durant l'hiver 42-43, qu'elle a subi sa plus lourde défaite historique.

C'est à Koursk, en juillet 43, que le noyau dur de sa puissance de feu -- les divisions de Pantzers -- a été définitivement brisé (500.000 tués et 1000 chars détruits en dix jours de combat !).

Pendant deux années, Staline a appelé les anglo-américains à ouvrir un deuxième front. En vain.

Lorsqu'enfin l'Allemagne est vaincue, que les soviétiques foncent vers l'Oder, que la Résistance -- souvent communiste -- engage des révoltes insurrectionnelles un peu partout en Europe, la bannière étoilée débarque soudain en Normandie...

 Nico Hirtt

 Nico Hirtt: Enseignant, écrivain

Professeur de physique, de mathématique et d’informatique dans l’enseignement secondaire supérieur.

Membre fondateur de l’Aped (Appel pour une école démocratique) et rédacteur en chef de la revue trimestrielle « L’école démocratique » (pour tous renseignements sur l’Aped et pour consulter certains des articles de Nico Hirtt, voir http://www.ecoledemocratique.org/

Bibliographie :

-- L'école sacrifiée, la démocratisation de l'enseignement à l'épreuve de la crise du capitalisme.
Nico Hirtt - Editions EPO, Bruxelles, 1996

-- School onder schot, de democratisering van het onderwijs niet bestand tegen de crisis,
(édition adaptée en néerlandais de "L'école sacrifiée")
Nico Hirtt, Hugo Vandroogenbroek, Annemie Mels - Editions EPOn Bruxelles, 1997

--Tableau Noir, résister à la privatisation de l'enseignement.
Gérard de Selys et Nico Hirtt, - Editions EPO, Bruxelles, 1998

--Les nouveaux maîtres de l'Ecole, l'enseignement européen sous la coupe des marchés.
Nico Hirtt, - éditions EPO (Bruxelles) et VO-Editions (Paris), 2000

--L’École prostituée, l’offensive des entreprises sur l’enseignement,
Nico Hirtt - éditions LABOR -2001).

Recherches:
Nico Hirtt et Jean-Pierre Kerckhofs : Inégaux devant l'école, Enquête en province du Hainaut sur les déterminants sociaux de l'échec et de la sélection scolaires, Aped, 1997

Articles principaux :
-- L’école dans les griffes du marché, Le Monde de l'Education, novembre 1996
-- Allègre-professeurs, un combat aux enjeux européens, Aped, mai 1999
-- Quand l'OCDE veut soumettre l'Ecole plus étroitement aux lois du marché, Aped, mai 1999
-- The business agenda behind Labour's education policy, Education & Social justice, Vol 1, n°4, 199
(Richard Hatcher et Nico Hirtt),
-- The Millenium Round and the liberalisation of the Education Market, Education & Social justice, Vol 2, n°2, 2000
-- OMC: l’éducation deviendra-t-elle marchandise ?, Le Courrier de l'Unesco, janvier 2000
-- Vol de vautours sur l’école des pauvres, La Banque mondiale veut stimuler l’enseignement privé dans les pays du Tiers-Monde, L'Ecole démocratique, n°3, 2000
-- Sommet européen de Lisbonne: L’étau numérique se resserre autour de l’Ecole, L'école démocratique, n°3, 2000
-- A l’ombre de la Table Ronde des industriels, La politique éducative de la Commission européenne, Les Cahiers d'Europe, n°3, hiver 2000.
-- La réforme de l’enseignement technique et professionnel en Communauté française de Belgique: Une mise en oeuvre du programme de la Table Ronde des industriels européens, Aped, 2000

 

6 juin 44 : ce qu'on ne vous dira pas demain - par Michel Collon -le 5 juin 2004-

Pourquoi Ford, GM et Esso ont-elles armé Hitler ?

MICHEL COLLON

"Oui, mais quand même les Américains nous ont ont libérés en 45!" Combien de fois, l'ai-je entendue celle-là! Sur les bancs de l'école. Mais aussi lors de débats sur les guerres actuelles des USA.
40-45, la seule 'bonne' guerre US ? Peut-être à nuancer. Quelques faits troublants sont documentés dans un excellent livre de l'historien Jacques Pauwels (1).

Ses documents irréfutables prouvent qu'une grande artie des sociétés US ont carrément collaboré avec Hitler, et pas seulement au début de la guerre : Du Pont, Union Carbide, Westinghouse, General Electric, Goodrich, Singer, Kodak, ITT, JP Morgan...
Pire. La grande nouveauté stratégique d'Hitler, ce fut la "Blitzkrieg", la guerre-éclair : porter très vite ses troupes au coeur de l'adversaire. Pour cela, deux conditions indispensables : des camions et de l'essence. L'Allemagne n'ayant aucun des deux, c'est Esso qui a fourni l'essence, tandis que les camions provenaient des usines allemandes de Ford et General Motors.

"Que cette guerre dure le plus longtemps possible!"
Pauwels montre que :
1. Une grande partie du patronat US était pro-Hitler dans les années 30 et 40.
2. Cela n'a changé qu'au moment où les ventes des firmes US furent mises en danger par l'agressivité commerciale allemande en Amérique latine et ailleurs. Et par les occupations japonaises qui confiquaient tout le commerce en Asie.

En fait, les Etats-Unis jouaient double jeu. Ils souhaitaient que la guerre dure longtemps. Pourquoi ?
D'un côté, les énormes profits que leurs sociétés réalisaient en Allemagne étaient en croissance. De l'autre côté, ils s'enrichissaient en prêtant à la Grande-Bretagne qui supportait tout le poids financier de la guerre. Washington posait d'ailleurs comme condition que Londres abandonne ses colonies après la guerre. Ce qui fut fait. Les Etats-Unis ont réussi à profiter de la Deuxième Guerre mondiale pour affaiblir leurs rivaux et devenir la seule superpuissance capitaliste.

Henry Ford : "Ni les Alliés, ni l'Axe ne devraient gagner la guerre. Les USA devraient fournir aux deux camps les moyens de continuer à se battre jusqu'à ce que tous deux s'effondrent."

Le futur président Harry Truman, 1941 : "Si l'Allemagne gagne, nous devons aider la Russie et si la Russie gagne, nous devons aider l'Allemagne, afin qu'il en meure le maximum de chaque côté."

Ce jeu cynique ne cessa que lorsque l'URSS vainquit Hitler. Alors seulement, les Etats-Unis se précipitèrent pour sauver leurs intérêts en Europe.

Demain 6 juin, on fera comme si la guerre avait été gagnée en Normandie et non à Stalingrad. On ne dira pas qu'Hitler perdit 90% de ses soldats à l'Est. Que pour un soldat US tué, il y en eut 53 soviétiques. Les manuels scolaires sont parfois bizarres, non ?

Voilà, désolé de vous avoir ôté une de vos dernières illusions. Demain, 6 juin, vous pourrez penser à tout ça lorsque sur une plage normande, on fêtera George Bush alors que son grand-père a financé Hitler. Dans quel monde vivons-nous ?

MICHEL COLLON

PS. Si vous êtes historien, si vous traquez les mythes, les tabous, les secrets de l'Histoire officielle, ou si vous connaissez de tels historiens, écrivez-nous. Notre site en construction fera bientôt connaître "l'Autre Histoire"...

(1). Paru en néerlandais sous le titre Le mythe de la bonne guerre (l'Amérique et la Deuxième Guerre mondiale), EPO 2000. La version française sort bientôt. A recommander, c'est aussi plein de révélations sur Roosevelt, Truman, la menace d'envahir l'URSS, la récupération des espions et criminels nazis, Churchill, De Gaulle, Yalta...

A propos des cérémonies du 60e anniversaire du débarquement.

  Les cérémonies du 60ème anniversaire du Jour J.

 Suivant notre age, nous nous souvenons de bien des cérémonies pour le Jour J: les 10, 20, 30, 40, 50 ans, et là une constatation saute aux yeux: pour le 60e, ça a été un vrai festival. Des directs pendant plus de 24 heures, aux traditionnels films en passant par les documentaires rien ne nous a été épargné pendant 1 semaine de célébrations (voir un peu plus). Certes, on peut penser qu'étant donné l'age des vétérans, c'était sans doute une des dernière fois où ils seraient là mais il doit bien y avoir des explications plus probables (et raisonnables) que ce sentimentalisme là !

J'ai trouvé deux grandes raisons justifiant l'importance des cérémonies. D'une part fêter ces événements permettaient de défendre certains intérêts des impérialistes. D'autre part, ils permettaient de mener une rude bataille idéologique/historique dans le sens des intérêts de la bourgeoisie.

En quoi ces cérémonies permettaient de défendre les intérêts des impérialistes ?

Tout d'abord, et cela doit sauter aux yeux, ces cérémonies ont été un moyen de se rapprocher pour les impérialistes qui se sont "opposés" sur le sujet de l'invasion de -ils diraient intervention en- l'Irak. Il faut se souvenir là, que lors des débats franco-français sur le soutien ou non à la ligne Bush, de nombreuses personnes avaient utilisé comme argument: "ils sont venus nous libérer en 44, nous devons les suivre pour libérer l'Irak". Il faut bien nous préparer à la grande réconciliation qui doit avoir lieu (1) (qui permettra aux impérialistes français, allemands, russes d'avoir leur part du gâteau irakien). Cette réconciliation serait facilitée par l'élection de John Kerry, mais elle aura lieu aussi avec Bush. Dès lors, ces cérémonies étaient l'occasion de nous préparer à accepter ça. Le repartage se fera aussi sous couvert de l'ONU, ce qui satisfera tous ceux qui n'ont pas compris qu'aujourd'hui l'ONUest un lieu de conciliation des impérialismes et non un lieu de "démocratie" mondiale (2). Deux éléments vont dans le sens de cette préparation psychologique: de nombreuses émissions se consacraient dans ce laps de temps à la critique de la "position française" sur l'Irak ("Mot croisés" du 7 juin, il me semble un opus de "c dans l'air"), et d'un autre coté la résolution de l'ONU sur l'Irak adoptée le 8 juin (sur le transfert de pouvoir et le maintien des troupes d'occupation)...

D'un autre coté, ces cérémonies ont été l'occasion de seriner que l'Union Européenne c'est la paix, et que donc pour continuer sans les guerres, il faut approuver la constitution ultra-libérale concoctée par VGE. On touche là à la grande illusion de la "construction européenne": elle nous garantirait la paix pour de longs moments. Le tout dans une "campagne" française où l'on a vu l'UMP appeler par l'intermédiaire de Raffarin à voter PS! Ah oui, c'est vrai, le PPE et le PSE ont gouverné main dans la main de 79 à 99... Qui a dit "Bonnet blanc et blanc bonnet" ?

Enfin, ces cérémonies ont permis aux impérialistes de faire une belle démonstration de force, qui s'est prolongée avec la réunion du G8. Gare à ceux qui barreraient la route à ceux là !

Décidément G8, résolution sur l'Irak, élections européennes, ces cérémonies étaient les bien venues!

En quoi ces cérémonies ont été le théatre d'une grande offensive idéologique et historique ?

Tout d'abord, comme d'habitude on a surestimé l'importance des US dans la seconde guerre mondiale (3). Ce n'est pas une nouveauté, il suffit d'observer la disproportion entre les films traitant du front ouest et ceux traitant du front est. On a "Paris brûle-t-il", "Le jour le plus long", "Un pont trop loin", "Qui veut sauver le soldat Ryan", "la grande évasion" il me semble aussi un truc du genre "la bataille d'Angleterre" (j"en oublie)... mais coté front est, on ne retrouve que le très anti-communiste "Stalingrad". Il y même plus de films sur l'attaque de mai-juin 40 que de films sur le front est ! Pourtant du strict point de vue des pertes, on trouve 20 millions de soviétiques contre 400.000 américains! Et la différence ne peut être mise sur une "incapacité" des généraux soviétiques... Si je me souviens bien, la plus grande bataille d'artillerie de l'Histoire, c'est Stalingrad. Et la plus grande bataille de char, c'est Kursk. La "rudesse" du front est peut être observée d'une manière simple: à travers les terres soviétiques, il y a eu des centaines d'Oradour sur Glanes. D'ailleurs, la division "das Reich" qui a brûlé le village en question (et ses habitants), venait du front est... elle n'a fait que continuer en France sur sa lancée soviétique! La bataille de Normandie a été une dure bataille, mais les pertes (40.000 soldats US) la font passer pour une naine à coté de bien des batailles de l'Histoire, ne serait-ce que Verdun ou la Marne !

Avant les célébration, le Jour J était présenté comme important dans le contexte français (après tout ce furent des GIs qui "libérèrent" la France (4). Après les célébrations il était devenu un grand jour dans l'Histoire de TOUTE l'humanité...

Ensuite, on en a profité pour attaquer l'URSS et Staline, par exemple sur Katyn, Varsovie... La Pologne est souvent revenue, ce n'est pas un hasard elle est utilisée aussi dans la "critique" du pacte germano-soviétique. Pourtant, on oublie de préciser que le gouvernement polonais avait toujours refusé de traiter avec l'URSS pour attaquer l'Allemagne avant 1938 (dans le cadre d'un pacte à 5 avec la France, l'Angleterre et la Tchécoslovaquie), ou encore l'annexion de Teschen (tchécoslovaque) le lendemain de Munich). J'ai ainsi entendu dans la nuit du 5 au 6 sur France 2 que Staline aurait projetté de sallier en 44 ou après avec Hitler pour attaquer les "démocraties" !

Au passage, on a pu entendre certaines perles: les bombardements des villes (20.000 civils tués pendant la bataille de Normandie) auraient été motivés par des objectifs comme des ponts.

Pourtant, au Havre, le premier pont était à Rouen (Tancarville, ni le pont de Normandie n'existaient alors). La ville a pourtant été rasée à 80%! Autre perle: les viols commis par les soldats US l'auraient été par des noirs dans leur large majorité! Là un parallèle m'est venu avec la propagande allemande menée sur le thème des tirailleurs sénégalais qui enlevaient et violaient des jeunes allemandes pendant l'occupation de la Ruhr dans l'entre deux guerres... Heureusement, un autre historien s'est empressé de minimiser ce "fait" en rappelant que les noirs étaient particulièrement facilement poursuivis quand les blancs profitaient de plus de mansuétude.

Mais SURTOUT toutes ces cérémonies ont été l'occasion de seriner que les anglos-américains seraient intervenus pour la "démocratie" ou la "liberté". C'est la version 39-45 de la guerre contre les "empires" de 14-18.

Non, les américains n'ont pas débarqué pour la "démocratie" ou la "liberté"! Ils sont venus parce que les intérêts des impérialistes américains ou anglais étaient en jeu, particulièrement si l'URSS remportait la guerre. Il fallait défendre le capitalisme, la bourgeoisie face aux rouges et à la classe ouvrière (5). D'ailleurs, comme cela a été entendu dans l'émission de Daniel Mermet sur France-Inter, dans le manuel distribué aux soldats US il était bien expliqué que l'intervention se faisait pour défendre les intérêts US et non pour la démocratie ou pour "sauver" les français. Cette peur de ce qu'impliquait la victoire soviétique, on la retrouve aussi dans les bombardements des populations civiles en France, en Allemagne, au Japon. Typiquement Hiroshima et Nagasaki ont permis d'une part, face à l'avancée des troupes soviétiques de mettre fin à la guerre rapidement, et d'autre part de bien faire comprendre à l'URSS que les USA avaient la bombe A (6). Accepter cette falsification, cette transformation d'une guerre au double caractère (ouvrier pour la défense de la patrie socialiste et de lutte contre le fascisme, bourgeois pour le caractère impérialiste de la guerre) en une guerre pour la "démocratie" et la "liberté", c'est accepter que la bourgeoisie nous raconte l'Histoire à sa façon.

Pour conclure, on pourrait faire un lien entre cette falsification de l'Histoire, et le refus de voir le drapeau rouge flotter lors des diverses cérémonies données chaque année au mont Valérien...

 

(1) Elle est appelé aussi par Ernest Antoine, qui a toujours rappelé qu'il ne fallait pas trop s'éloigner du sillage US.

(2) D'ailleurs les soldats casques bleus ne sont pas mieux reçus que les casques normaux. Ont peut se rappeler de bien des interventions où ils sont rejetés (Somalie, ex-Yougoslavie...).

(3) Un très bon dossier là:
http://www.katardat.org/marxuniv/2002-SUWW2/US2GM/00US2GMStart.html#partie1

(4) Ils oublient la Résistance, sans doute trop rouge à leurs yeux.

(5) Howard Zinn, dans son "Histoire Populaire des Etats Unis", traite de l'opposition d'une partie des "étatsuniens" à la guerre...

(6) Avant Hiroshima et Nagasaki, le Japon avait fait une proposition de paix à l'URSS qui l'avait refusée, étant donné qu'elle n'était pas adressée à l'ensemble des alliés.

Fabien LB -18-06-2004

vu sur le site du PTB : http://www.ptb.be/scripts/article.phtml?lang=1&obid=24080

Bush redébarque en Normandie:
Liquidez quelques mythes de la Seconde Guerre mondiale
par Lieven Soete -16-06-2004

Il y avait du monde sur les plages de Normandie: le pape Bush II a pu y célébrer sa grand-messe, entouré par tous ses cardinaux de l'Occident libre. On a ressorti les violons, à propos de «la bataille décisive contre le nazisme» et du ciel qu'il nous faut continuer à remercier parce que les Américains sont venus nous libérer. D'ici peu, vous partirez sans doute en vacances. Un tuyau: emportez un bouquin, histoire de vous sortir de la tête quelques mythes coriaces sur la Seconde Guerre mondiale.

Les Américains n'étaient-ils donc pas de vrais démocrates et antifascistes ?

Le peuple américain, dans sa grande majorité, si, certainement. Et nous respectons bien sûr tous les soldats américains qui ont combattu pour vaincre les monstres fascistes. Tout comme nous voulons honorer les combattants marocains, congolais, indiens, polonais, chinois, vietnamiens contre le nazisme et le fascisme japonais.

Mais les dirigeants et le patronat américains? Il existe des preuves irréfutables que les grandes entreprises américaines ont avidement collaboré avec Hitler et les nazis: Du Pont, Union Carbide, Westinghouse, General Electric, Goodrich, Singer, Kodak, IBM, ITT, JP Morgan... Plus encore: sans le pétrole de la Texaco et de la Standard Oil, sans les camions Ford et General Motors, les nazis n'auraient jamais pu mener à bien leur fameuse «Blitzkrieg». Ils n'auraient même jamais osé attaquer l'URSS en juin 1941 !

La bourgeoisie américaine n'opte ouvertement pour le camp allié qu'en décembre 1941. Parce que le grand capital allemand se montre trop agressif en Amérique latine, le «jardin naturel» des Etats-Unis. Et surtout parce que le Japon bloque l'accès aux indispensables matières premières de l'Asie ­ et surtout le caoutchouc indonésien.

Les Américains n'ont-ils pas assuré des percées décisives dans la lutte contre le fascisme ?

Le premier tournant de la Seconde Guerre mondiale a été la résistance héroïque du peuple soviétique, dès juin 1941. Au cours des vingt premiers jours de la guerre en URSS, l'armée nazie a perdu plus de soldats et d'officiers que durant toutes les campagnes menées en Europe occidentale entre 1939 et 1941.

Les généraux allemands avaient prévu entre six et huit semaines pour mettre l'Union soviétique à genoux. Kiev et Odessa ont tenu 73 jours, Sébastopol 250, Leningrad 900.

En octobre 1941, l'«inarrêtable» machine de guerre allemande est bloquée une première fois devant Moscou. En décembre, les Soviétiques repoussent les Allemands de 100 à 350 km. Ceux-ci perdent 50 des 783 divisions au total qu'en compagnie de leurs alliés, ils mettront sur pied au cours de l'ensemble de la Seconde Guerre mondiale.

Cette victoire à proximité de Moscou revêt une très grande signification militaire, politique et morale. L'Union soviétique était non seulement en état d'arrêter les fascistes, dont la suprématie, partout ailleurs, s'était montrée fatale, mais encore de briser sa puissance barbare. Des 783 divisions des nazis et de leurs alliés, 607, soit plus des trois quarts, allaient être anéanties sur le front germano-soviétique.

De loin, le Jour J le plus important de la Seconde Guerre mondiale a été le 2 février 1943: la victoire de Stalingrad. Dans cette seule bataille de Stalingrad, deux fois plus de troupes allemandes ont été éliminées (détruites ou forcées à se rendre) que durant toutes les opérations combinées sur le front occidental entre le débarquement de Normandie et la capitulation.

Mais nous pouvons quand même célébrer le Jour J comme une journée de fête de l'antifascisme ?

Il existe de meilleures dates à célébrer, comme celle de la victoire définitive sur le fascisme, le 8 mai 1945, supprimé comme jour férié, en Belgique. Nousdevons également commémorer cette victoire le 11 novembre. C'est le jour de 1918 où les bourgeoisies américaine, allemande, française, britannique et belge ont décidé de mettre un terme (provisoire) aux massacres. Parce qu'un grand danger menaçait: des révolutions en Allemagne et en France, à l'exemple de la révolution bolchevique en Russie. Cet anticommunisme est également le dénominateur commun avec le Jour J et les grands-messes qui accompagnent sa commémoration.

Le surlendemain de l'attaque nazie contre l'URSS, le 24 juin 1941, Harry Truman (futur président des USA en 1945) écrivait dans le New York Times:
«Si nous voyons que la Russie l'emporte, nous aiderons l'Allemagne. Si l'Allemagne l'emporte, nous aiderons la Russie. Laissons-les se massacrer le plus possible entre eux(1) Durant trois ans, les impérialistes occidentaux laisseront les Soviétiques se débrouiller pratiquement seuls, dans cette boucherie. Et, finalement, en 1944, «quand ils s'aperçoivent que la Russie l'emporte, ils viennent aider l'Allemagne».

Le VIP flamand Luc De Vos, éminent prof d'histoire à l'Ecole Royale Militaire, explique la chose avec subtilité et fierté. «Le débarquement de Normandie a renforcé la politique des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne. A terme, il préserve l'Europe occidentale du communisme. Dorénavant, le libéralisme économique va régner dans la région nord-atlantique et, dès ce moment, va imposer sa volonté au reste du monde. Le Jour J en tant que bouclier contre le communisme.»(2)

 (1) Karl-Eduard von Schnitzler, Der Rote Kanal, Hambourg, 1992, p.308 ·

(2) De Morgen, 4 juin 1994.

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Pour infos:

--Site: L'Union soviétique sous la direction de Joseph Staline et la lutte contre le fascisme: la Deuxième Guerre mondiale

--Quatre ouvrages sur la Seconde Guerre mondiale

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