(suite de la page précédente)

Comment édifier le parti marxiste-léniniste:

Création en France d'un véritable
parti révolutionnaire du prolétariat

(Pratique et expérience accumulée d'octobre 1963 au 12 juin 1968)

çpage précédente

Suite è

..... En 1963, le Parti communiste français était-il encore un Parti marxiste-léniniste, un Parti révolutionnaire prolétarien ?

..... Pour donner à cette question une réponse concrète sérieuse, échappant à tout subjectivisme, il importe d'abord de réfuter les allégations des prétendus théoriciens et historiens qui, par esprit antiparti relevant de l'idéologie bourgeoise comme par anticommunisme, s'appliquent à démontrer que le Parti né au Congrès de Tours ne fut JAMAIS ni révolutionnaire, ni prolétarien, ni marxiste, ni léniniste.

..... Pendant longtemps le Parti communiste français a été un Parti de classe du prolétariat, indépendant de tout lien organisationnel ou d'autre nature avec la classe dominante, la bourgeoisie. Seuls sociaux-démocrates, gauchistes et anticommunistes pouvaient alors et peuvent aujourd'hui s'efforcer de démontrer le contraire. Anarchistes et trotskistes, n'allaient-ils pas et ne vont-ils pas jusqu'à contester le caractère positif des bilans historiques de la Révolution d'Octobre et de la Troisième Internationale ?

..... En fait, le Parti communiste français est né à l'occasion de la rupture entre le marxisme enrichi par les expériences et théories de LENINE et le révisionnisme qui, à l'occasion de la première guerre mondiale entre impérialismes rivaux, s'était définitivement démasqué par sa collaboration de classes avec les bourgeoisies chauvines et par sa trahison des intérêts des classes ouvrières des pays engagés dans le combat.
..... Que l'on disserte longuement, aujourd'hui, sur le contenu de certaines interventions prononcées au Congrès de Tours, celles par exemple de Marcel CACHIN ou de Paul VAILLANT-COUTURIER nettement teintées d'un pacifisme abstrait (le " pacifisme bêlant ") ne permet nullement de changer la signification historique et le contenu principal et fondamental de l'événement survenu en décembre 1920. Les deux tiers des 250 délégués à ce XVIIIe Congrès national du Parti socialiste (S.F.I.O.), en acceptant les 21 conditions de l'Internationale communiste (rédigées par LENINE lui-même) choisirent de ROMPRE avec la Deuxième Internationale et de s'engager dans la voie de la construction d'un Parti de type nouveau. Ce Parti avait alors pour modèle le Parti bolchevik qui avait su et pu conduire les peuples de l'Empire russe au, renversement violent du pouvoir des Tsars, de l'aristocratie et de la bourgeoisie grand-russes et à la destruction, de leur Etat. La section française de l'Internationale communiste naissait pour préparer, organiser, diriger et faire triompher en France la révolution prolétarienne.

L'HISTOIRE DU PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS

..... L'Histoire du Parti communiste français alors fondé reste à écrire, du moins si l'on s'en tient à la nécessité de la concevoir sous l'angle du matérialisme historique et dialectique.
..... Sans doute dispose-t-on d'ores et déjà de nombreux documents présentés par leurs auteurs, à différentes époques, comme résumant ou développant cette Histoire. Si ces travaux contiennent des éléments d'information utilisables, ils sont presque toujours accompagnés d'explications ou interprétations dont le subjectivisme se rattache à des tendances qui ont reflété, à un moment donné, la lutte de lignes, et donc la lutte entre idéologies différentes, à l'intérieur du Parti, quand ce n'est pas avec ses ennemis avoués de l'extérieur (1).
..... Mais l'Histoire ne peut accéder à l'exactitude qu'à condition de devenir une science délibérément placée sous le signe du socialisme scientifique, dans le respect des positions idéologiques du prolétariat. En dehors de cette conception, elle ne reste que littérature... avec un contenu de classe bourgeois.
..... Les communistes chinois ont rappelé à partir de 1963 ce qu'avait souligné MAO Tsétoung, dès août 1937, dans son œuvre philosophique fondamentale " De la contradiction " :
..... " L'opposition et la lutte entre conceptions différentes apparaissent constamment au sein du Parti ; c'est le reflet, dans le Parti, des contradictions de classes et des contradictions entre le nouveau et l'ancien existant dans la société. S'il n'y avait pas dans le Parti de contradictions, et de luttes idéologiques pour les résoudre, la vie du Parti prendrait fin. "

..... Les différentes versions de l'Histoire du Parti communiste français manifestent justement et ces contradictions et les luttes de classes de la société française à travers un demi-siècle. L'Histoire de ce Parti aujourd'hui quinquagénaire ne saurait être rigoureusement véridique si son exposé ne se réfère pas constamment et sans nulle complaisance subjectiviste à son développement dialectique, manifestation continuelle de la lutte de classes à travers les luttes de lignes, qu'elles soient ouvertes, étouffées ou brisées.

..... L'élaborer et l'écrire ne relève pas d'une gageure, mais exigera de longs, patients et collectifs efforts que les impératifs des luttes en cours renvoient à plus tard, si l'on excepte quelques analyses sur des points particuliers et limités.

..... Aussi n'apporterons-nous provisoirement que quelques explications générales et sommaires pour répondre par la négative à la question posée en tête de cet article :

..... En 1963, le Parti communiste français n'était PLUS un Parti marxiste-léniniste, n'était PLUS un Parti révolutionnaire prolétarien.

..... Que nos lecteurs se reportent par exemple au point 24 des " Propositions concernant la ligne générale du Mouvement communiste international " que nous avons déjà cité dans " Prolétariat " n° 3 aux pages 53 et 54. Qu'ils s'efforcent de réfléchir par eux-mêmes et collectivement, en fonction de leurs propres connaissances et expériences, et de vérifier ainsi si le Parti communiste français répondait, en 1963, aux critères marxistes-léninistes rappelés par le Comité central du Parti communiste chinois. Ils ne pourront que constater de profondes divergences, ayant des racines plus ou moins anciennes dans la vie du Parti en cause, dans ses luttes internes et extérieures.

..... Pour n'envisager que la période postérieure à la fin de la Seconde guerre mondiale, et pour nous astreindre à la concision indispensable au développement du propos principal de cette étude, sans les analyser en profondeur nous ne fournirons que quatre exemples caractéristiques d'événements anciens annonciateurs de la dégénérescence révisionniste :

..... (1) L'interview de Maurice Thorez au journal britannique " Times ", le 18 novembre 1946, révisant les enseignements théoriques de LENINE et l'expérience de la Révolution d'Octobre sur la question du passage au socialisme (Cf. " Les Cahiers du Communisme " n°11, Novembre 1946 - Pages 1014 à 1016).

..... 2) L'absence totale de rectification idéologique et politique, et de suite durable à l'autocritique sur la pratique de l'unité dans le Front populaire et dans le Front national pendant la Résistance présentée par Maurice THOREZ devant la session du Comité central le 29 octobre 1947 (Cf. " L'Humanité nouvelle " n°37 du 19 janvier 1967, page 10).

..... 3) Le vote en faveur des " pouvoirs spéciaux " demandés par Guy MOLLET à propos de la guerre d'ALGERIE, lors du scrutin sur la question de confiance posée par le Président du Conseil socialiste le 12 mars 1956. Le groupe parlementaire communiste, sur directive du Bureau politique du Comité central, trahit alors délibérément le principe marxiste-léniniste de l'internationalisme prolétarien et notamment la Huitième des 21 Conditions d'admission à l'Internationale communiste (Cf. " Les Cahiers du Communisme " n° 4 - Avril 1956 - Pages 493 à 496 comportant la méprisable intervention de Jacques DUCLOS à l'Assemblée Nationale).

..... 4) La violation complète du principe léniniste de la coexistence pacifique, revu et trahi sous la baguette révisionniste de KHROUCHTCHEV. En 1959, le Bureau politique et Maurice THOREZ critiquèrent les élus de la région parisienne, qui avaient refusé de participer à une réception officielle offerte à l'Hôtel de Ville de PARIS au chef de file de l'impérialisme américain, EISENHOWER. La visite du chef du gouvernement américain s'était effectuée à une époque où le Mouvement communiste international qualifiait encore l'impérialisme américain de " rempart principal de la réaction mondiale, gendarme international et ennemi des peuples du monde entier. " Nous savons maintenant, et ce " nous " vaut aussi bien pour les anciens membres du Parti communiste français que pour les militants marxistes-léninistes des nouvelles générations qui n'ont jamais appartenu à ses rangs, que la lutte entre Marxisme-léninisme et révisionnisme moderne avait pris un essor nouveau à partir du XXe Congrès du Parti communiste d'Union soviétique. C'est dire qu'en 1963, cette lutte se développait déjà depuis sept années (2).

..... En 1956, le Khrouchtchévisme était devenu le chef de file de l'idéologie et de la politique de trahison des principes du marxisme-léninisme (3).

..... De 1956 à 1963, dans notre pays, et dans les rangs du vieux Parti, nombre de militants, isolés les uns des autres, engagèrent des luttes difficiles contre l'orientation révisionniste qui se précipitait. Certes, depuis la fondation du Parti fin 1920, de telles luttes de lignes avaient conduit à des situations successives où dominaient soit l'idéologie opportuniste de la petite-bourgeoisie, soit l'idéologie révolutionnaire du prolétariat. Mais, durant cette période (1920-1956), en dépit des erreurs commises (dont la recherche et l'analyse ne constituent pas le propos du présent article), le contenu idéologique, politique et social de l'Internationale communiste, puis du Bureau d'Information des Partis communistes et ouvriers et enfin du Mouvement communiste international, conservant un caractère principalement prolétarien et révolutionnaire, entrava les tentatives des représentants de la bourgeoisie infiltrés dans les rangs et dans les organismes dirigeants du Parti communiste français.

..... Après 1956, la lutte s'engagea en France sur plusieurs questions précises :

..... - contre la critique de STALINE telle qu'elle avait été présentée au XXe Congrès du Parti communiste d'Union SOVIETIQUE, acceptée et soutenue par THOREZ et les dirigeants français du Parti communiste français. La critique de KHROUCHTCHEV et de ses complices n'avait nullement pour but la rectification autocritique d'erreurs théoriques, idéologiques et politiques, mais visait essentiellement à précipiter le déferlement du révisionnisme amenant la trahison des principes marxistes-léninistes et favorisant la restauration du capitalisme en U.R.S.S. et dans d'autres pays socialistes.

..... - Contre la politique du Parti communiste français sur les questions coloniales, à propos de la guerre d'ALGERIE plus spécialement. Cette politique rompait avec la ligne de solidarité politique et matérielle active qui avait prévalu pendant la juste guerre de libération nationale menée par les peuples d'INDOCHINE contre le colonialisme français.

..... - Contre la tactique opportuniste d'alliance avec le Parti socialiste S.F.I.O. Cette tactique ne se fondait nullement sur une analyse concrète de la situation des classes sociales en FRANCE et s'efforçait d'ignorer délibérément la fonction historique bien connue des dirigeants sociaux-démocrates et de leur Parti, au service de l'impérialisme et du capitalisme.

..... Peu informés, et en tout cas lorsqu'ils l'étaient, de manière strictement unilatérale, au sujet des contradictions opposant le Parti du Travail d'ALBANIE et le Parti communiste d'Union SOVIETIQUE, les militants du Parti communiste français désireux de défendre et faire triompher le marxisme-léninisme n'engagèrent pas de lutte particulière sur cette question dont l'importance et la portée historique ne devait se révéler, par bribes, qu'à partir de 1962 (4).

..... Dans la pratique, il y a lieu de considérer que les luttes menées de manière systématique et consciente contre le révisionnisme moderne par des militants marxistes-léninistes restèrent des luttes presque individuelles, ou se limitant à quelques adhérents d'une cellule donnée, jusqu'au milieu de l'année 1963.

..... Les articles publiés à l'occasion du 90e anniversaire de la naissance de LENINE en 1960 par différents organes chinois et réunis sous le titre " Vive le léninisme " restèrent très peu connus des communistes français, n'étant pas repris dans les publications du Parti communiste français.

..... Le 27 février 1963, l'éditorial du " Renmin Ribao " eut pour titre : " D'où proviennent les divergences ? - Réponse à Maurice THOREZ et d'autres camarades. " (5). II s'agissait alors de riposter à la campagne publique commencée en décembre 1962 par THOREZ et d'autres dirigeants du Parti communiste français pour attaquer le Parti frère chinois.

..... L'article du quotidien chinois commençait justement par rappeler la série d'articles dans lesquels les " camarades " français avaient lancé leurs attaques :

..... " ... Le discours de Maurice THOREZ du 14 décembre 1962 au Comité central du Parti communiste français ;

..... L'" information " de Raymond GUYOT, membre du Bureau politique du Parti communiste français, donnée le 14 décembre 1962 au Comité central du Parti communiste français, sur les problèmes relatifs à la situation internationale et à l'unité du mouvement communiste et ouvrier international ;

..... L'éditorial écrit par Raymond GUYOT pour l'Humanité, organe central du Parti communiste français, du 9 janvier 1963 ;

..... Un article publié le même jour par l'hebdomadaire France-Nouvelle, organe central du Parti communiste français, et ayant pour titre : " Guerre, Paix et dogmatisme " ;

..... Une série de dix articles publiés dans l'Humanité du 5 au 16 janvier 1963 et attaquant nommément le Parti communiste chinois ;

..... Un article paru le 16 janvier 1963 dans l'hebdomadaire France-Nouvelle, sous le titre : " A quelle époque vivons-nous ? " ;

..... La brochure " Problèmes du mouvement communiste international ", éditée en janvier 1963 par le Comité central du Parti communiste français (recueil de quinze documents consacrés aux attaques portées ces trois dernières années par certains dirigeants du Parti communiste français contre le Parti communiste chinois, notamment l'intervention de Maurice THOREZ à la Conférence de Moscou des partis frères en novembre 1960, ainsi que le rapport qu'il fit ensuite à ce sujet au Comité central du Parti communiste français réuni en séance plénière) ;

..... Un article de Raymond GUYOT dans l'Humanité du 15 février 1963. "

..... Le journal chinois avait d'ailleurs commencé par publier l'essentiel du contenu de ces articles français dans son édition du 24 février précédent. Aussi, après avoir réfuté point par point tous les arguments avancés par les dirigeants français et démontré leur caractère mensonger, calomniateur et leurs origines dans la ligne prônée par KHROUCHTCHEV, pouvait-il proclamer :

..... " ...Des faits cités plus haut, on peut voir clairement aussi que THOREZ et certains autres camarades du Parti communiste français ont adopté une attitude irresponsable vraiment surprenante au sujet du grave débat qui se déroule actuellement dans le mouvement communiste international. Ils recourent à la duperie, bloquent les nouvelles, escamotent les faits et déforment le point de vue du Parti communiste chinois de façon à pouvoir lancer des attaques outrancières contre celui-ci. Ce n'est certainement pas la bonne manière de mener un débat et cela ne témoigne pas d'un sens des responsabilités envers les membres du Parti communiste français et la classe ouvrière française. Si Maurice THOREZ et les autres camarades ont le courage d'affronter les faits et croient avoir raison, ils devraient faire connaître au public les matériaux où le Parti communiste chinois expose son point de vue, notamment les articles que nous avons publiés ces derniers temps et qui ont trait aux problèmes en question, afin que tous les membres du Parti communiste français, toute la classe ouvrière française, connaissent la vérité et jugent eux-mêmes ce qui est juste et ce qui est faux. Camarade THOREZ et les autres camarades, nous avons publié les propos et les écrits où vous nous blâmez. En ferez-vous autant pour nos écrits ?... En aurez-vous le courage ?... "

..... Naturellement, cet éditorial du Renmin Ribao ne fut nullement connu des militants français, auxquels les dirigeants du Parti communiste français se gardèrent bien de le communiquer. Ce n'est que plus tard, quand les divergences se furent approfondies de façon irréversible, au moment de la rupture, qu'il put arriver en France, traduit dans notre langue par les camarades chinois eux-mêmes. 

çpage précédente

Suite è

 

-RETOUR-